Le râteau

Le râteau

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Vague à l'âme, Amour, PhiloSex

29 Dec 20

Les désenchantements de l’amour, c’est un peu comme une gueule de bois, le lendemain d’une super soirée. Et plus elle était bonne, plus on a plané, plus on s’est senti grisé, ivre d’amour, porté, plus la chute est violente. C’est la descente après un bon shoot de coke…
Cet état d’amour était-il irréel ? Était-on tout bonnement drogué ?
Pourquoi la douleur est-elle si vive ? Quand on est ado, je veux bien, on ne sait pas encore qu’on est pas vraiment au bout de sa vie. Mais quand on a plus de cinquante ans !?!? Franchement ?!? Comment ça peut faire toujours aussi mal ?!?

L’état amoureux nous amène à mettre entre parenthèses une grande partie de notre réalité. “Je suis amoureux… puisque j’attends” nous dit Roland Barthes dans ses “Fragments d’un discours amoureux”, nous montrant combien cette attente est pinçante, lancinante, totalisante. C’est comme si l’être, l’âme se résumait à l’état d’attente : on est plus qu’attente, limitant le temps et l’espace à celle-ci. Comme si le reste du monde était vu au travers du prisme illuminé de l’amour, enchanté. La réalité reste sujette à cet état impétueux et extatique qu’on voudrait reproduire à tout prix, au prix de s’inventer une réalité où cet amour aurait l’espace et le temps de s’accomplir et s’épanouir.

Puis si l’attente fait place au râteau, c’est la désillusion. Tout redevient terne. Gris. Pénible. Lourd. C’est la gueule de bois, la descente. Pendant les semaines d’amour, puis les semaines de désenchantement, le monde est limité à la nébuleuse amoureuse. La bande passante est courte. On est ailleurs, tentant jour après jour de remplacer, douloureusement, ces lambeaux de relation désarticulés qui s’étiolent en lamentations.

Alors je réfléchis : comment est-ce possible ? Comment cette éblouissante réalité, contenue dans ce si précieux vase en cristal a pu s’écraser lamentablement sur le sol de la cuisine ?
C’était toi ? Ou l’idée de toi transportée dans un monde dans lequel s’était épanouie l’idée de toi ? Sacré Platon, ces idées projetées sur le mur de la caverne m’ont encore joué des tours. Avais-je envie de toi ou de l’idée de toi ? J’ai pris ces quelques bribes aperçues en plein trip pour les étirer jusqu’à remplir mes plus ardents désirs de permanence : un couple, et ainsi sécuriser mes angoisses.
Mais finalement je vois bien à présent que si bien nous étions sûrement deux au climax de ce trip, je suis partie en vrille, j’ai décollé sur un jet que je pilotais toute seule. J’ai comblé les vides, je me suis décollée de la réalité, de notre réalité. J’ai extrapolé cette idée de toi car j’ai perdu le contact. J’ai créé cette réalité parce que je n’ai pas été assez en relation avec toi. Je n’ai pas voulu voir, écouter. J’ai perdu la réalité du moment présent pour me perdre dans la construction d’une réalité projetée.
Projetée comme le vase en cristal sur le sol de la cuisine.
Je m’coupe la main en ramassant les morceaux (“l’alcool ça grise et ça commence…” Chacun fait, fait, fait... c'qui lui plait, plait, plait 😂😂😂 mais si, on a encore 15 ans 😏).

C’est là que je retrouve l’adage qui veut que la douleur est inévitable mais que la souffrance est un choix.
Alors quel sera le mien ?
14 jours.


Ils en parlent :

Chacun fait c'qui lui plaît - Chagrin d'amour

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